30 novembre 2008

A vot' santé !

Certains ont, l'air de rien, laissé entendre sur le blog que nous ne prenions pas assez souvent l'apéro faute de ne pas utiliser quotidiennement le sextant... C'est mal nous connaitre.

Avec un Pastis 51, face au soleil couchant il ne manque que notre petite chanson préférée pour vous sentir à notre place (ou presque).

Départ prévu de Mindelo direction Tobago (ou Grenade si arrivée de nuit sur Tobago) le 4 décembre 5 décembre si les conditions le permettent. 2100 milles nautiques, soit environ 3900km et, si tout se passe bien, environ 16 jours de traversée.

Merci à Corléone pour sa merveilleuse compil de musique Italienne :)

29 novembre 2008

Tarte à la patate douce

Aujourd'hui je vous propose, exhumée des archives de traversée (donc : réalisable en mer !), cette recette d'automne qui à coup sûr enverra au placard tout alternative plus classique à la courge ou au potimarron.

Ingrédients :
- 1 oignon doux rouge
- 1 patate douce à chair blanche (en Espagne, ça s’appelle « batata ») (env.200g)
- 1 patate douce à chair jaune (env.200g)
- 3 tranches fines de bacon fumé ou une petite poignée de lardons
- 1 brique de crème fraîche liquide
- 1 œuf
- Sel, poivre 5 épices

Pour la pâte brisée :
Mélanger 150 g de farine complète + 150 g de farine blanche avec 100 g de beurre et 1 cuillère à café de sel. Pétrir en ajoutant un œuf et un peu d’eau (de mer) jusqu’à obtenir une pâte souple et non collante.

Préparation :
Émincer finement l’oignon et le faire rissoler dans un peu d’huile d’olive dans le fond d’une cocotte minute jusqu’à ce qu’il soit translucide. Couper les deux patates douces en petits carrés d’1,5 cm de côté environ. Les verser sur l’oignon, ajouter le bacon coupé en petits bouts. Remuer le tout jusqu’à ce que le bacon soit cuit. Ajouter ensuite ½ verre d’eau, fermer la cocotte et au sifflement cuire pendant 10 minutes.
Pendant ce temps, étaler la pâte brisée dans le moule et y faire quelques trous à la pointe d’une fourchette.
Lorsque les patates sont cuites, remuer dans la cocotte avec une spatule en bois de façon à obtenir un mélange moitié purée, moitié morceaux (s’il reste trop d’eau au fond de la cocotte, la vider auparavant).
Battre un œuf dans un bol, ajouter la crème liquide. Saler, poivrer. Verser la crème sur les patates dans la cocotte. Remuer délicatement. Verser cette garniture sur le fond de tarte et faire cuire à four moyen pendant 40 minutes. La pâte brisée doit être craquante à l’extérieur et fondante à cœur. En refroidissant, la garniture se solidifie un peu.
Servir avec une petite salade, de type mesclun de jeunes pousses + roquette, ou mâche, avec un trait de balsamique et d’huile de noix.
Déguster !

NB : pour une version végétarienne, remplacer le bacon par une pincée de thym et de romarin.

28 novembre 2008

Live in Mindelo

Eolienne : comment ne pas perdre les ampères qui vous sont dus

Notre Rutland 913 n’a jamais été un foudre de guerre. En effet on peut dire que si elle nous fournit 3 ou 4 ampères en moyenne sur un vent de 15 nœuds on est content. Au mouillage, elle s’y tient sans souci mais en navigation, c’est un autre problème, surtout quand la mer est formée. Il suffit de la regarder en mouvement pendant quelques minutes pour comprendre ce qui se passe : elle s’emballe quelques secondes jusqu’à ce que la prochaine vague atteignant le bateau la lance dans une série de tours sur son mât. Il en résulte un ralentissement notable de la rotation des pales et il faudra encore quelques secondes pour qu’elle se repositionne au vent pour enfin reprendre de la vitesse.
Le shunt confirme que la perte s'élève à environ la moitié de ce attendu. C’est fâcheux.
Pour limiter le phénomène mon premier réflexe a été de frapper une garcette tendue partant du bout de la girouette de l’éolienne jusqu'à un point d’amarrage divers, en fonction de l’allure. Ça fonctionne mais finalement ça pose plus de problème que ça n’en résout. D’abord, il est difficile de trouver un point d’amarrage pour chaque allure. Ensuite, il faut renouveler la position à chaque changement d’allure, un oubli faisant perdre encore plus que tout ce qu’on a pu gagner auparavant. Bref, un peu frustré, j’ai renoncé au bout de quelques jours à cette solution douteuse.
La solution (celle qui marche) m’apparut en regardant de plus près le problème. C’était en plein quart de nuit, alors que le vent soufflait à environ 20 nœuds et que je lançais des jurons en l’air aux ingénieurs qui ont inventé cette foutue machine (et qui ne connaissent manifestement que le plancher des vaches).
En effet, le constat est clair : pour une allure donnée, le sens de rotation autour du mât est le même dans environ 95% des cas. Ce qui d’ailleurs est parfaitement logique, les vagues s’engagent sous le bateau par un bord pour s’éloigner par le bord opposé.

Sachant cela, le problème est vite résolu :
Prendre une garcette d’environ 2 mètres, la frapper d’un coté sur l’extrémité de la girouette et de l’autre côté sur son mât, à environ 1 mètre sous le moyeu. Au bout de quelques instants, l’éolienne ayant parcouru quelques tours sur elle même, elle se bloquera naturellement en ayant enroulé la garcette autour du mât (voir la photo). Au changement d'amure, la garcette s'enroule toute seule dans l'autre sens ! A l’usage, 2 mètres semblent appropriés (dans mon cas) car cela autorise l’éolienne à tenir toutes les directions en usant de la flexibilité du cordage.

Le gain est réel.

27 novembre 2008

En exclusivité : la vidéo des dauphins !

La plus belle rencontre de la traversée vers le Cap Vert ! Ça a duré une bonne heure, cette béatitute à les observer à l'étrave et tout autour du bateau (l'incisivité du commentaire s'en ressent vous remarquerez :)

Mindelo, petit havre de paix

C’est un flamboyant coucher de soleil qui nous a accueillis à l’approche de l’île de Sao Vicente. La lumière totalement irréelle nous donnait l’impression d’être éclairés par des spots électriques oranges !
















Le lendemain de notre arrivée, nous avons pris le chemin de la Police Maritime, qui se trouve à l’est de la marina de Mindelo, dans un long bâtiment administratif défraîchi au crépi jaunâtre. Un grand malabar souriant dans son uniforme nous a fait remplir les formulaires d’entrée sur le territoire et relatifs au bateau. Il a gardé notre Titre de navigation, et comme le précise le règlement qu’il nous distribue, les papiers nous seront restitués au paiement d’une "petite taxe " (entre 1500 et 5000 escudos soit entre 15 et 50 euros) 24 heures avant notre départ. Puis nous longeons la plage, sur laquelle poussent de jolis arbres verts et trapus, pour nous rendre au bureau de l’immigration (labellisé « emigration office » sur la porte). Parfois je me plains de la monotonie des couloirs et des bureaux de l’administration dans laquelle je travaille mais là, l’officier qui nous reçoit est plus à plaindre. Son bureau fait moins de 8 mètres carrés, avec pour tout accessoire en dehors de la table et de la chaise, un téléphone et une machine à écrire. En tout cas, il parle français, nous tamponne nos passeports avec solennité et nous salue : l’opération aura duré moins de 5 minutes.

Le mouillage où nous sommes jouxte les pontons de la marina qui, agrandie depuis peu, permet d’accueillir plus d’une centaine de bateaux. Elle est très proprette, et il y a l’électricité et l’eau (sous réserve de payer les litres consommés) aux pontons. Les employés parlent anglais et français. Il y a aussi un petit « parc à dinghies », où l’on peut laisser l’annexe en sécurité, mais moyennant la somme de 3 euros par jour. La marina est sur pilotis et elle est reliée à la terre par une passerelle avec un portail grillagé. Au paiement de la place de port ou des 3 euros du dinghy, on nous donne un petit pass électronique qui ouvre le portail. Le pass se périme en fin de journée, et il faut repayer pour en obtenir un autre le lendemain. Ingénieux moyen de s’assurer que tout le monde s’acquitte bien de son dû pour pouvoir sortir du port. Gage de sécurité également, répondront certains… On a bien fait la connaissance d’Umberto, un gars du coin qui parle couramment français et qui nous proposait de garder notre annexe amarrée à un pilier de bois sur la plage « en la surveillant continuellement », pour 3 euros à débattre, mais
personne n’ayant encore fait affaire avec lui (son pilier de bois est toujours vide), nous optons pour l’option de la marina.

Mindelo a des airs de Brésil avec toute la langueur et la quiétude que confèrent le statut insulaire de petit archipel. Nos premiers pas dans la ville nous ont poussé, sous le soleil et la chaleur, dans les rues principales où les bâtiments aux façades joliment peintes de couleurs vives rappellent l’ancien temps de domination portugaise (NB : le Cap Vert a gagné son indépendance en 1975). Ceci me fait penser à une anecdote vécue peu de temps après notre arrivée au mouillage. Autour de nous, une majorité de pavillons français, quelques allemands, des suisses, des canadiens et… de américains. En l’occurrence, deux superbes catamarans scrupuleusement astiqués la journée comme s’il s’agissait de rutilants 4X4. Bribe de conversation saisie au vol entre les deux bateaux (je n’entends que celui qui est au vent). « Really ??? Man, I don’t have that one ! ». Le « that » concerne le pavillon du Cap Vert. C’est un joli drapeau bleu foncé sur lequel sont matérialisées dix étoiles symbolisant les dix îles de l’archipel, avec une bande rouge en arrière plan. L’américain en question avait hissé, en guise de pavillon de courtoisie… le drapeau du Portugal ! Après tout, ici, on parle portugais, non ? J’imagine tout à fait, au Maroc, hisser le pavillon français en guise de drapeau national : une boulette qui aurait été du plus bel effet ! Heureusement ici, les gens sont incroyablement détendus.

A Mindelo nous avons trouvé des petits cafés et bars locaux, le plus souvent meublés formica-plastique rouge que bois peint et photos locales encadrées, dans lesquels les gens sirotent la bière d’ici, la Strela, qui vous coûtera entre 1 et 1 euro cinquante, en mangeant des petits accras aux formes diverses, tous délicieux (2 euros la douzaine). Dans la rue, les femmes vendent des fruits (papayes et bananes) ou des fines herbes (coriandre, persil) dans de grosses bassines en plastique qu’elles portent sur la tête. Les vieux discutent assis à l’ombre des arbres des places. Il y a bien quelques vendeurs ambulants qui proposent aux touristes le fameux tryptique babioles-lunettes-t-shirts mais ils sont si peu insistants qu’ils en deviennent immédiatement sympatiques : d’emblée, le dialogue s’installe, ponctué de francs sourires et de tapes dans le dos, même si on a précisé qu’on n’achèterait rien aujourd’hui. Une rareté, cette chaleur et cette propension à communiquer des habitants qui sont d’une gentillesse désarmante. Au marché, les vendeuses s’appliquent à détailler d’où viennent les oranges et les fromages, même si on s’adresse à elles en espagnol… Au café, la serveuse vous apprend les rudiments du créole local, pour dire « merci » ou « au revoir ». Il y a beaucoup de locaux qui parlent très bien le français. J’ai lu que la présence de l’Alliance Française à Mindelo était un relais efficace de la francophonie et qu’il n’y a pas si longtemps, le français était la première langue étrangère obligatoire à l’école (aujourd’hui les jeunes choisissent aussi l’anglais).

Ici la vie s’anime apparemment en fin de semaine avec concerts divers de cette enivrante musique endémique qu’on a tous entendu à travers la célébrissime Cesaria Evora locale. On peut notamment entendre de la musique live le dimanche soir au « Clube Nautico », le bar des plaisanciers (plutôt que des marins) qui est en face de la marina. L’endroit est super accueillant, avec de solides tables en bois, des fresques et des sculptures plein les murs, des photos immortalisant la prise d’un énorme marlin de près de 3 mètres, une vieille voile tendue au plafond.

Sur le bord de mer il y a le marché aux poissons. Il se trouve dans une grande tour en pierre d’époque. A l’intérieur, un brouhaha et une forte odeur. Très peu de touristes viennent ici, on dirait. Donc en franchissant les marches, on est alpagués par tous les vendeurs. J’ai récemment découvert un site fabuleux « mindelo.info », en français, qui donne une foule de renseignements sur la ville et aussi propose un guide complet d’initiation au créole local, le Crioulo. J’ai appris les rudiments, ce qui me facilite grandement la tâche pour négocier les prix. Les gens me demandent si j’habite ici ! J’ai lu que le marché est approvisionné deux fois par jour par les pêcheurs : le matin à 8 heures et l’après-midi vers 16 heures. La première fois, j’y suis allée à 16 heures et j’ai acheté deux soles et un gros pageot très frais (c'est-à-dire, ouïes bien rouges, corps dur comme du bois qui tient tout droit à l’horizontal quand il est tenu au bout de la main) pour 1,50 euros le tout. On s’est régalés le soir avec les soles en panures et le pageot au four avec une farce à la coriandre. Ce qui est pratique, c’est que des jeunes gars, une fois l’affaire conclue avec le vendeur, vous proposent de les vider moyennant quelques dizaines d’escudos. Aujourd’hui, j’y suis allée le matin à 10h30. Les poissons me semblaient un peu moins frais, donc plus mous. J’ai pris quand même deux simili-dorades et deux soles. Arrivée au bateau, j’ai humé le sac : le temps du trajet, les poissons se sont mis à sentir fort et j’ai dû les jeter… Demain j’irai à l’ouverture pour être sûre d’avoir la pêche la plus fraîche !

Voilà donc les premières impressions de cette ville qui nous ravit. C’aurait été vraiment dommage de faire l’impasse sur le Cap Vert pour lequel on a un réel coup de cœur. Reste à découvrir les montagnes, les restos du coin, les flâneries dans les rues… Que du bonheur !

Quelques photos de la traversée vers le Cap Vert !

Hé oui pas possible de les insérer avec les messages envoyés avec l'Iridium ! Mais voici le retard rattrapé !













24 novembre 2008

Destination Cap Vert - J+7

Arrivée ce soir à Mindelo 22h30 heure locale !!! La dernière demi-journée s'est faite au moteur dans la pétole, mais temps magnifique. La température est réellement montée de plusieurs degrés comparé aux Canaries, et il semble qu'ici on peut rester en short et t-shirt même la nuit ! C'est un peu les tropiques :) L'équipage est en pleine forme, l'arrivée au mouillage (à côté du port) s'est déroulée dans la sérénité même si la prudence était de rigueur, nuit oblige. Il y a plusieurs autres bateaux de voyage autour de nous, mais dans une proportion moindre qu'à Las Palmas. Une bonne nuit de sommeil ininterrompue s'impose avant d'aller découvrir la ville et faire toute la paperasserie d'entrée sur le territoire... Nous sommes très fiers de notre Grégal qui nous a portés ici sans encombres et à bonne allure : pas mal pour un vétéran ! Sur ce à très bientôt pour de nouveaux billets !
L'équipage qui signe ici sa première plus longue traversée réussie soit 7 jours et 8h30 pour 850 milles parcourus.


22 novembre 2008

Destination Cap Vert - J+6

Nous voilà depuis 7 j en mer ! Auj, vent variable force 4 à 6 E-N-E, avons repris depuis 2 jours la config grand voile + génois classique pour allures de travers à grand largue. Beau temps, qq nuages, mer agitée avec houle. Dans la nuit de jeudi, un petit oiseau des mers est entré dans le carré par le hublot ! Tt noir taille d'un pigeon pieds palmés noirs. S'est reposé puis a repris son vol une fois redéposé dans le cockpit (ne sait pas marcher). Hier soir, rebelote sur les animaux volants, cette fois un poisson volant qui s'est échoué aussi directement dans le carré en passant tout droit par la descente. Pénible à saisir : Tom est venu à la rescousse. A perdu des écailles en route mais a retrouvé la mer sain et sauf. Autre évènement d'hier : Tom a pêché à nouveau une très grosse bonite (hé oui il s'agit de "bonites à ventre rayé" qu'on trouve d'ailleurs en boîte aux Canaries dans les hypers à côté du thon). Environ 8 kilos : ns avons procédé à une salaison géante dans un seau selon la méthode de la merveilleuse Michka. Verrons bien ce que ça donne ! En principe arrivée prévue demain si le vent nous accompagne tjrs bien. Aude masterise aux mots fléchés pdt les quarts. Pas de frasques culinaires si ce n'est des lasagnes aux légumes fort appréciées :) Merci pour tous vos textos Iridium qui nous font bien plaisir !


20 novembre 2008

Destination Cap Vert - J+4

Ces temps-ci, les débuts de nuit sont noirs car la lune se lève vers 23h30. Ce matin, peu de vent (2 à 3 Bft) mais qui nous permet d'avancer à 4 nœuds en moy avec les voiles d'avant. A 7h30, visite de 4 dauphins qui ont escorté Grégal pdt 1h. Hier, l'écran de l'ordi de Tom s'est cassé : on a mis celui de Aude sur lequel étaient installés tous les logiciels de nav. Reste à en trouver un neuf de remplacement ! Le vent s'est levé en début d'aprèm pour s'établir davantage nord-est que cette nuit, force 4-5. Mer peu agitée, qq nuages. Tom s'ingénie à bricoler un tas de trucs pour faciliter la vie à bord et la navigation. Un peu + de fatigue mais on ralentit le rythme. Aude attaque "Les Racines du ciel" (cf.Céc). Arrivée probable à Mindelo dans 3 jours 1/2 si tt va bien. Kim Nico message bien reçu : merci ! (NB : est-ce que ces messages + la carte s'affichent bien sur le blog ? pour ceux qui pourront répondre par texto sur l'Iridium :)



19 novembre 2008

Destination Cap Vert – J+3

Alizés assez stables, 3 à 5 beaufort. Un peu de houle. Beau temps ensoleillé. 135 milles parcourus dans les dernières 24 heures. Les quarts sont bien en place avec des tranches de 3 heures à partir de 20h30 jusqu'à 10h (voire plus si fatigue). On s'attache avec harnais. Nous avons eu la visite d'un banc de plusieurs dizaines de dauphins à 16h qui nous ont salué en sifflant et en sautant tout autour du bateau pendant près d'une heure ! Formidable (plein de vidéos).
Nous sommes en forme et la vie à bord est paisible (beignets d'aubergines succulents). Pas un bateau en vue depuis 2 jours.



18 novembre 2008

Destination Cap Vert – J+2

Toujours vent NNE, forcissant à 15 nœuds depuis ce matin. Les 2 voiles d'avant jumelles ont été renvoyées hier soir, déportées sur leur tangon respectif. Grégal avance si naturellement que le vérin du pilote bronche à peine. Vitesse de croisière quasiment atteinte (env. 6 nœuds) sur une mer peu agitée devenant agitée au moment ou j'écris ces lignes (tiens, d'ailleurs ça commence à rouler…). 24°C à l'ombre, j'ai tombé le t-shirt. Aude a cuisiné une tarte à la patate douce et un pain de campagne pour accompagner jamón y quesos… Pas de bouletas en perspective pour les prochaines 24h. Hier soir Aude a encore perdu au Yam. Ce matin, pendant mon quart, j'ai caressé quelques dauphins. 205 nm au compteur, encore 625.



17 novembre 2008

Destination Cap Vert – J+1

Décollage le 16/11 à 14h00 de Puerto Rico (Gran Canaria). Jolie brise jusqu'à 16h00 puis le vent de secteur Sud a faibli et s'orienta secteur Nord – Est en milieu de nuit (env. 4 nœuds). Grégal se traîne à 2 nœuds au grand largue avec deux génois jumeaux tangonés, grand voile affalée. Au petit matin, on change de voile d'avant et c'est le spi léger qui est envoyé. Le vent reste faible (env. 7 noeuds) mais nous avançons à une moyenne de 4.5 nœuds sur une mer belle. Le ciel est légèrement voilé. Un beau ketch nous a dépassé cette nuit au moteur et ce matin, lui avec ces voiles en ciseaux, nous avec le spi : il se prend 1.5 nœuds dans la vue. A l'heure actuelle, on ne le voit presque plus dans notre sillage ! J'adore.


Aude dit : « On est trop bieeeeeennnnnnnnnnn ! ».
Bref ça roule :)

13 novembre 2008

Las Palmas de Gran Canaria

Las Palmas est une mégapole d'un peu moins de 400 000 habitants, chef lieu du gouvernement autonome des Canaries et située au nord-est de l'île de Gran Canaria. Ça fait toujours un drôle d'effet de rentrer dans ces rades de ports énormes, bordées de buildings, où sont parqués plusieurs ferrys dont les puissantes sirènes vous font vibrer toute la colonne vertébrale. Le port de Las palmas est bondé en ce moment : nous n'avons même pas essayé d'y trouver une place et avons filé au mouillage, de l'autre côté de la digue, devant la plage. Il faut dire que près de 320 bateaux sont arrivés en masse pour participer - en payant cher - au célèbre "Rallye de l'ARC" (Atlantic Rally for Cruisers), une initiative proposant de traverser l'Atlantique (Las Palmas - Sainte Lucie aux Antilles) entre gens de bon alloi, en prenant un minimum de risques car tout est organisé et huilé comme un Paris-Dakar (staff présent partout, briefings tous les jours...). C'est peut-être l'ARC qui a le plus retenu notre attention dès notre arrivée. D'abord parce que tous les bateaux participants arborent l'étendart "ARC 2008" et cela permet donc de constater que ce sont eux qui occupent les 2/3 du port. Ou peut-être, parce que tout ici est organisé pour servir et divertir les charmants "crews" (équipages) qui participent à l'ARC : les restaurants proposent des menus "spécial ARC" (à des prix rhédibitoires malgré ce), les supermarchés des réductions "spécial ARC", les bars des "cocktails ARC"... A vous en donner la nausée. Le pompon est selon nous détenu haut la main par un resto chic du port qui proposait des soirées pour participants à l'ARC avec menu et animations à la clé, mais tenez vous bien, ceci en fonction de la longueur de votre bateau ! Eh oui, lundi, c'est pour les voiliers de plus de 15 mètres, mardi, pour ceux entre 12 et 14 mètres, mercredi, tout ce qui en dessous de 11 mètres. Ah mais ici on ne mélange pas les torchons et les serviettes, Good Lord ! Malheureusement, l'ARC ne prend le départ que le 20 novembre prochain. Pas d'espoir de les voir tous disparaître d'un coup comme ils sont venus. Nous nous inclinerons donc et partirons les premiers.

Las Palmas nous a permis de renouer avec la civilisation urbaine : en ville j'ai découvert un immmmennnssse grand magasin (de la taille du Printemps à Paris), qui tient les deux côtés d'une avenue. J'y ai trainé Tom qui a eu le tournis assez vite, pressé de retourner à la quiétude du marin hauturier, et moi j'en ai profité pour me délecter des décorations de Noël et de mille et une futilités du monde de la consommation de masse...
Nous avons surtout profité de notre escale dans cette ville-centre où l'on trouve tout pour préparer le bateau aux prochaines "grandes" navigations à venir : avitaillement complet et remplissage des cales avec toutes sortes de vivres (oui, il y a bien sûr un joli stock de bouletas), dont un superbe jambon entier qui pend désormais au mât dans le carré (NB : on a fait nos courses chez HiperDino qui livre gratuitement jusqu'au port au-delà de 60 euros d'achats), achat d'une nouvelle paire de chaussures-bateau pour Tom dont l'ancienne paire jouait au crocodile (il avait tout d'abord refusé de s'en acheter de nouvelles prétextant qu'il allait réparer ses vieilles avec le matériel de reprisage des voiles : vous voyez un peu le tableau... J'ai dû faire un pré-repérage dans les boutiques qui soldaient encore pour lui éviter le mal de tête provoqué par la civilisation), réparations diverses et bricolages sur le bateau (remplacement des vis de serrage du safran qui montraient des signes de faiblesse + restratification epoxy pour la finition, graissage des winches, vidange du moteur et changement du filtre à huile). Ces travaux de bricolage ont été l'occasion de faire plusieurs aller-retour chez l'un des shipchandler du port qui est vraiment super : "Rolnautic". Les vendeurs sont ultra-professionnels, bilingues anglais, et nous ont traité avec la même attention que pour les bermudas-à-pinces de l'ARC, même à l'époque des chaussures-qui-baillent de Tom. Il nous ont souvent fait cadeau de petites pièces (vis inox...) et ont toujours essayé de nous dépanner pour chaque requête qu'on pouvait leur faire, même les plus délicates (exemple : trouver un régultateur d'allure d'occasion, mais là ils ont eu beau passer des coups de fil à des collègues du milieu ça n'a rien donné). On en a aussi profité pour acheter 20 mètres supplémentaires de chaîne de 8 galvanisée, car l'ancienne montrait de sérieux signes de fatigue.
Sans oublier bien sûr l'Internet à volonté dans Grégal, grâce au Wifi du Club de voile très sélect juste en face du mouillage. Ce plein de bruits de klaxons, de défilements de voiture, de gratte-ciels et d'hypermarchés une fois terminé, nous allons nous diriger vers un petit port tranquille au nord-ouest de l'île de Gran Canaria pour terminer les derniers préparatifs avant de hisser les voiles pour rejoindre le Cap Vert (850 milles tout de même ! :).

9 novembre 2008

Position en live pour quelques octets

Après avoir fait joujou avec l'API de Google Maps nous sommes dorénavant capables d'afficher une carte satellite donnant notre position en live (à 3 mètres près) sur le blog pour une 50ène d'octets supplémentaires; soit trois fois rien. Pratique pour indiquer notre avancé pendant les longues traversées (via l'Iridium). Alors oui, je sens déjà la blagounette sur la carte ci-dessous... J'interviens donc tout de suite : la position est exacte, c'est juste que la photo ne date pas d'aujourd'hui hein... Donc si on ne voit pas le Grégal il ne faut pas s'angoisser, c'est normal : on le verra peut être dans un an :)
Le bidule rouge affiche notre position. On peut se déplacer sur la zone et aussi zoomer/dezoomer en utilisant les +/- affichés en haut à gauche de la carte.



Nous sommes donc à Las Palmas, mouillage partagé par de nombreux voiliers s'apprêtant à rejoindre le Cap Vert ou à traverser l'atlantique. Je n'en dis pas plus, ça mérite un billet.

8 novembre 2008

Le thon de Tom !

Après nos défaites, nous avons été obligés de nous réapprovisionner en Rapala. Nous en avons acheté 3 nouveaux aux styles différents. Ça n'a pas loupé, le jour même, entre Fuerteventura et Gran Canaria, on a attrapé un beau thon au Rapala X-Rap !

Bon d'accord... il est un peu plus petit que celui de Nico mais maintenant que j'ai la technique rien ne pourra m'arreter ! ;)

6 novembre 2008

Pêche : passons aux choses sérieuses

Depuis que nous avons quitté Isla de Lobos nous nous sommes mis en tête de reprendre sérieusement la pêche. Peut-être que de mon côté les bouletas espagnoles ont influencé cette décision. Toujours est-il que d’un commun accord nous décidâmes de lancer la ligne armée du Rapala qui nous a déjà ramené tant de dorades coryphènes…

Premier essai: Premier couac
1 heure plus tard, à environ 3 milles de la côte Est de Fuerteventura, le moulinet se met a chanter cette musique tant appréciée par l’équipage et qui suscite une vive émotion. Le fil de pêche s’en va fond de caisse et si je laisse faire, dans 10 secondes c’est sûre il n’y en aura plus. Premier reflex, tac, je sers le frein. Le coquin au bout de la ligne ne l’entend pas de ce ton et relance des séries d’attaques à la verticale du bateau maintenant. La bataille continue plusieurs minutes avec le bateau lancé à toute allure, génois tangoné, pas question de toucher quoi que ce soit sur les voiles.
La dorade coryphène de moins de 50cm, c’est super easy. Il arrive même que le moulinet ne dise rien alors qu’un de ces beaux poissons se trouve au bout de la ligne. Moi, j’avais pris cette mauvaise habitude (n’est-ce pas Gérald ?) qui consiste à laisser la canne sur son support au lieu de la prendre calée sur les abdominaux, tout en remontant le gentil poisson.
Au moment où j’aperçois un véritable obus à quelques mètres sous le bateau, aude me fait passer le ganch. Grave erreur stratégique et je m’en veux encore... La canne est donc sur son socle, le frein serré fort et le thon à deux mètres sous le bateau. Maintenant imaginez une masse de plus ou moins 15 kilos à qui on laisse prendre de l’élan et qui tire à la verticale de la canne, c'est-à-dire sans user de la flexion de celle-ci. Résultat des courses : le bout de la canne s’est brisé sur 4cm et la ligne a cassée net. Gros coup dur au moral, surtout que cette canne, au-delà de ses qualités, a une réelle valeur sentimentale.

2ème étape : La mort du Rapala de M. Briot
La canne est utilisable sans souci, et je pense déjà à une réparation de fortune. Pour l’instant elle demeure fonctionnelle et donc : changement de Rapala. Passons au petit tout griffé et dont les hameçons, bouffés par la rouille, peuvent tuer un poisson du tétanos en l’espace de quelques secondes.
Quelques minutes plus tard, 2nd pitage… tout aussi costaud que le 1er. Pas d’erreur cette fois : je cale la canne sur le ventre avec une main sur le manche, l’autre sur le moulinet. L’effort n’a pas durée bien longtemps. Je remonte la ligne, un peu dégoûté, et il n’y plus de poisson au bout mais seulement ce vieux leurre qui à perdu toutes ses pointes d’hameçon. Rha…

3ème étape : Salut à toi mon amie la dorade
Bon là il ne nous reste plus qu’une seule solution… Le Rapala Big Game de 30cm : Véritable tueur de Thon. Décidé, je l’accroche à l’émerillon. C’est marrant parce qu’avec ce gros Rapala, juste en le traînant on a l’impression d’avoir attrapé un poisson. Mais rien ne vient et le soleil entame fidèlement sa descente à l’Ouest.
Nous avançons bien et le mouillage se dessine à quelques milles au Sud. Il va malheureusement falloir penser à remonter la ligne et se résoudre à accepter notre échec. Mais ce n’est pas grave, on se rattrapera à la palangrotte demain matin…
C’était sans compter sur le 3ème et dernier pitage de la journée. La technique s’améliore et en moins de 2 minutes, une petite dorade coryphène de 40cm est allongée dans le cockpit ! Le sourire revient même si mon thon (après celui de Nico) je n’en verrai pas la couleur aujourd’hui :)

5 novembre 2008

Isla de Lobos à Gran Tarajal

4 novembre 2008

Bilan à 3 mois

Voilà ! Cela va faire 3 mois que nous vivons en mer sur notre bon vieux Grégal. L'occasion de faire un point sur ce que l'on a remarqué et sur ce qui a évolué au cours du voyage...

1) Etat d'esprit de l'équipage : le capitaine, comme le mousse, sont BEAUCOUP plus détendus. Rien à voir avec les angoisses des premiers mouillages ou des premiers coups de vent ! Sur la vie en traversée, le capitaine se révèle un vieux loup de mer qui se délecte du temps lent et tranquille et de la mer qui défile, occupe son temps à bricoler, à pêcher et à régler les voiles pour optimiser la navigation. Le mousse se plaint un peu plus de ne pas arriver à s'occuper comme il voudrait, parce que ça gîte et ça secoue parfois, mais avec la pratique, son amarinage lui permet d'éviter le mal de mer. Le mousse se demande comment vont être les traversées plus longues, et s'il ne va pas trouver le temps long, alors que le capitaine piaffe d'impatience. Une constante commune : l'équipage se ravit à chaque fois de découvrir une nouvelle escale ou de sortir le bateau dans de belles conditions pour des navigations agréables et sportives où l'on voit tout le potentiel du Grégal régatier pas encore à la retraite !

2) Apprentissage du mousse : Le mousse (on peut dire l'équipière peut-être maintenant, hein) a progressé : il sait envoyer les voiles, les affaler / enrouler, barrer dans des conditions de vent diverses, manœuvrer au mouillage (mais pas encore dans les ports : la preuve, sa dernière tentative pour se garer à Marina Rubicon a bien failli aboutir à la destruction d'une barcasse amarrée sur la place où Grégal devait se parquer), cuisiner en mer, télécharger un fichier Grib, faire une route sur Maxsea, opérer une veille active de jour et repérer le sens de marche des cargos la nuit. En revanche, l'équipière-mousse reste toujours tête en l'air (décidément, la vigilance dont on doit faire montre à chaque instant sur un bateau est épuisante), et se met parfois à confondre le sens du vent ou sa gauche et sa droite.

3) Compétences du capitaine : La rigueur du capitaine et ses compétences de marin sont en revanche confirmées haut la main : repérage, identification et réparations des soucis matériels et mécaniques divers, oeil aiguisé en mer tant au niveau des conditions de vent que de sécurité, manoeuvres de port fluides et mouillages réfléchis, surveillance de route pointue et veille permanente sur tout ce qui pourrait clocher sur Grégal comme sur la mer alentour.

4) Comportement du bateau : malgré ses 32 ans bien frappés, Grégal continue de naviguer fièrement. Il remonte très bien au près, ce qui est une merveille à constater, mais il roule au portant, ce qui n'est pas toujours très agréable si une bonne houle est là pour le ballotter un peu plus. Le jeu de voiles à disposition nous a permis d'expérimenter tout un tas de configurations, du spi léger au spi plus résistant en passant par les focs jumeaux ou le génois tangonnés. Le vieux moteur hors-bord Yamaha Malta ne nous a fait aucune crasse et continue de démarrer au quart de tour. Il n'y a pas à dire : c'est le luxe d'avoir un moteur sur l'annexe ! Le vieux Volvo inboard, quant à lui, tourne comme une horloge depuis qu'on a réparé son tuyau d'alimentation. Nous avons également renvoyé le tuyau de l'anti-syphon du moteur dans le cockpit et les calles sont désormais saines. Côté aménagements intérieurs, nous sommes ravis du WC marin et du coin toilette, ou de l'évier avec ses deux pompes eau douce - eau de mer qu'on a posé (même si cela tient parfois de l'effort athlétique de pomper pour faire une vaisselle à la gîte). Grégal est confortable et l'on s'y sent bien même s'il n'est pas très vaste. Tout le monde nous a complimenté sur les boiseries et les vernis qui lui donnent un petit air de vieux pub irlandais. En revanche, les matelas du lit sont un peu fins et nous cassent le dos à la longue. Mais on ne peut pas tout avoir...

5) Les haltes dans les ports : l'équipage est unanimement efficace pour le ravitaillement tous azimuts dans les marinas et ce en un temps record. Parallèlement, l'équipage a bien moins souvent besoin d'aller dans ces mêmes ports et peut désormais gérer ses ressources pendant plusieurs semaines d'affilée (notamment l'eau douce, même si cela lui vaut quelques jours de cheveux gras).

6) La pêche : l'équipage, grâce à son matériel de compétition, sait pêcher un poisson à chaque navigation, ce qui impressionne toujours les bateaux rencontrés qui, eux, ne pêchent qu'à la poissonnerie.

7) La météo : le système des gribs avec l'Iridium se révèle efficace et a permis de prendre la mer à chaque fois dans les conditions attendues, sans se faire surprendre (mais toujours en prévoyant un bon 20% de marge sécuritaire de force de vent en plus que celle annoncée). Cela dit, l'équipage relève que passé le mois d'août et la pointe ouest de la Sardaigne, il a dû ranger ses tongs et ses maillots de bain au placard, car le climat a davantage tenu de la mi-saison et du frais de l'automne que de la clémence de l'été. C'est là qu'on a été content d'avoir judicieusement emporté (en quantités) pulls en laine, coupes-vents, baskets et chaussettes, voire même chapeaux, parce que par exemple sur la côte sud de l'Espagne au mois de septembre-octobre il faisait moins de 15°C ! Même au Maroc et ici aux Canaries, on ne se baigne pas, car la mer est bien fraîche ! La dernière fois que le mousse a été nager dans l'eau, c'était début septembre à Propriano !!! (Bon, dommage pour lui, le capitaine doit régulièrement se coller aux baignades froides pour aller vérifier la tenue de l'ancre au mouillage...).

8) La vie sans frigo : l'équipage s'en sort très bien sans frigo (cela fera l'objet d'un billet à part entière) et se débrouille toujours pour avoir un bel approvisionnement de fruits et légumes frais. Avec ses dizaines de livres de cuisine, le mousse vire au cordon-bleu du réchaud à cardan, et cela permet de sortir du bolino-maquereaux - pâtes à la tomate.

9) La sympathie de l'équipage : l'équipage sait se montrer affable, souriant, et toujours prêt à offrir l'apéro aux bateaux-copains (friend ships :).

10) Le mot de la fin : l'équipage se dit qu'il a bien fait de se lancer dans l'aventure car même dans les moments pénibles (par exemple barrer sous la pluie par 12°C avec le ponente dans le nez) et si son compte en banque amorce une chute libre, le jeu en vaut la chandelle !

Petit déroulé du quotidien

Quelques très belles photos, de l'eau bleue, trois lignes suggestives... vous allez vous dire : mais que peuvent-ils bien faire de leurs journées, ces deux-là, qui ne travaillent pas depuis des mois ? N'ont-ils plus que la force de poster des images, tant une flémingite aigüe pèse sur leur programme récréatif ? Nous n'allons pas vous laisser comme ça, avec toutes ces questions qui vous taraudent : voici ce qui s'est réellement passé ces dernières 24 heures...

Hier, nous n'avons pas chômé. Nous étions pour une courte escale dans l'enceinte d'un complexe ultra-intégré de marina moderne nommé "Marina Rubicon", au sud de l'île de Lanzarote. Construite en 2003, cette marina est un joli modèle d'architecture "non défigurante". Petites constructions basses peintes à la chaux blanche, petites passerelle en bois sur pilotis qui serpentent entre les pontons et les restaurants, et concernant ces derniers, une profusion de choix allant du japonais au snack à tapas en passant par le grill et la cuisine locale, gros centre commercial avec supermarché, blowling, boutiques à gogos, supermarché allemand et dentiste allemand : tout pour satisfaire la clientèle touristique locale qui, vous l'aurez deviné, est constituée à 80% de saxons. Ici rien n'est laissé au hasard : le ponton d'accueil est un mini-lac intérieur à l'entrée du port, sur lequel donnent la capitainerie, le shipchandler et le club de plongée. A l'approche du ponton, un membre du staff vous aide à accoster. A la capitainerie, on vous explique (en anglais ou en allemand totalement blilingue, au choix en dehors de l'espagnol) gentiment où vous serez placé, on vous montre le plan, puis on vous donne une petite pochette avec toutes les infos dont vous êtes susceptible d'avoir besoin, accompagnée de votre clé des douches et votre ticket pour la piscine. Le tout pour 15 euros la nuit pour un voilier de 10 mètres. Pas mal, le niveau de service. La seule ombre à ce joli tableau touristique, c'est un bloc de petites maisons de pêcheurs un peu décrépies, qui se trouve au milieu du complexe, coincé entre le Shopping Center et le kiosque de location de VTT. Sur les murs, sont peints en rouge de gigantesques points d'interrogation et d'exclamation. Devant les maisons, sur le sable, une petite barque est échouée, et sur son flanc est écrit : "Pour avoir enlevé la mer, vous m'avez condamné à mourir". Sur le côté d'une maison, en grand, face au supermarché, en grosses lettres : "Ici, il y avait une plage" (aussi en anglais et allemand, pour toucher la clientèle). Je m'étonne : "serait-ce un repère d'écologistes ultras qui protestent contre les développements touristiques à outrance ?". Tom hausse les épaules : "Ou tout simplement des gens qui habitaient là, et dont la maison avant donnait sur la mer"... Bref, nous n'avons pas chômé : plein d'eau (ENFIN !), d'électricité, de gaz, de gasoil, de fruits et légumes, grosses lessives (2/3 à la main, 1/3 machine, étendu ingénieusement au ras du sol dans le cockpit car pour ne pas défigurer le complexe, les étendages sauvages sur les filières sont prohibés). Notre temps passé en marina est maintenant hyper optimisé. On se partage les tâches et cela nous permet même de prendre du bon temps, comme ce petit verre au soir du 2 novembre pour fêter nos trois mois de vie en mer !

En fin d'après-midi, nous mettons le cap sur la petite île de Lobos, entre l'île de Lanzarote et celle de Fuerteventura. Deux heures et demi de bonheur en navigation, grand soleil, première fois que l'on peut se mettre en t-shirt sur le pont. Ici, soit le ciel est couvert, et il fait une vingtaine de degrés, soit il pointe son nez, et il fait tout de suite 35°C (pour indice de sa force, les faces rouges des touristes en short qui sirotent leurs cocktails aux terrasses des bars, dont je me demandent d'ailleurs si elles n'ont pas donné son nom à cette marina). Arrivée juste pour l'apéro de 18 heures, ti punch au soleil couchant devant la petite Isla de Lobos (jadis peuplée de "loups" de mer). Devant nous, juste des collines de cailloux et une petite baraque en bois qui sert probablement au parc naturel.

Aujourd'hui, lever à 7 heures pour Tom. Autant à la maison, je dois le harceler toutes les dix minutes pour qu'il se traîne hors du lit juste à temps pour ne pas arriver trop tard au boulot, autant là, il est toujours le premier levé. Il me dit que c'est son moment préféré, ce petit matin alors que le soleil est levé depuis peu et que tout le monde dort encore. Ensuite, je me lève vers 8 heures et demie ou plutôt 9 heures. Petit déjeuner souvent à base d'oeufs au plat au bacon sur des toasts, ou tartines de pain beurré et confiture, selon l'approvisionnement (le beurre ici est rare !), ou yaourts maison (promis je donnerai prochainement ma recette en cocotte !). En mer par mouillage calme, on peut vaquer à toutes sortes d'occupations : ce matin, j'ai passé un moment à jardiner, c'est à dire, repiquer des petites boutures de plantes que je ramasse à droite et à gauche et qui constituent mon mini-jardin du bord (on ne se refait pas !) (+ celui qui trouve de quelle plante sont issues les deux pousses dans le pot coloré est trop fort !). Tom sort des palangrottes pour le repas du soir. Ensuite, pour ma part, un heure et demie d'espagnol à écouter mes leçons sur CD sur le poste radio et à faire inlassablement des exercices de concordance des temps. Je progresse, mais c'est long. Tom code un peu sur l'ordi. Il fait encore trop froid pour se baigner mais l'eau est limpide. Quelques touristes amenés par des bateaux de croisière ne se posent pas autant de question et plongent. Puis je m'essaye à la peinture à l'encre : c'est délicat et là je ne progresse pas trop, mais Tom me dit que c'est pas si mal. A midi, carbonara de pennes aux courgettes grillées. Puis nous irons faire un tour sur la petite île aux cailloux voir s'il reste un phoque rescapé. Ce soir, pourquoi ne pas se lancer dans une partie de yam à la lueur de la lampe à pétrole (où je me fais systématiquement laminer) avant de regarder un petit film ? Alberic a raison, elle est plutôt belle la vie...

Le pied, tout simplement

Isla de Lobos. Soleil. Deux voiliers (nous compris). Petite réserve naturelle. Wifi venant de je ne sais où... Elle est pas belle la vie ?


Je m'en vais sortir les palangrottes parce qu'ici à mon avis... ça va être assez facile.